Les abeilles dans le monde

Il y a quelques années, lors d’un séjour au Népal, un ami apiculteur-voyageur a rencontré et échangé avec un apiculteur de la région de Dhikur Pokhari à l’ouest de Pokhara. Celui-ci élevait, de façon artisanale, des abeilles de l’espèce Apis cerana. C’est le récit de ce souvenir de voyage qui m’a donné envie de parler des espèces d’abeilles mellifères à travers le monde afin d’y voir plus clair sur la complexité et l’évolution du genre Apis !

De façon très résumé voici ce qu’il en ressort…

Apiculteur de la région de Dhikur Pokhari /Photo: Philippe Massetti

Au fil des bouleversements géologiques et climatiques, des populations d’abeilles du genre Apis se sont retrouvées isolées, par les barrières géographiques naturelles telles que des chaînes de montagnes, dans différentes régions du monde, il y a de cela 9 à 6 millions d’années.

Apis mellifera, présente à l’origine en Europe et en Afrique, a été utilisée par l’homme pour la récolte de son miel dès le Néolithique, probablement entre 6000 et 10’000 ans avant Jésus Christ. Au siècle dernier, elle fut dispersée dans le monde entier à la faveur de l’apiculture. Car cette abeille sauvage du genre Apis, qui fait partie des 20’000 espèces d’abeilles qui existent sur terre, est la seule à fabriquer, avec la petite Melipona (Melipona quadrifasciata) d’Amérique centrale et du sud, le miel et ses dérivés, tels que la cire, la gelée royale et la propolis. L’espèce Apis mellifera est divisée en quatre lignées (A, M, C et O) et 29 sous-espèces dont l’Apis mellifera mellifera ou abeille noire, l’abeille endémique d’Europe du nord.

Pour en savoir plus: https://www.pollinis.org/publications/labeille-noire-une-perle-de-plus-en-plus-rare-quil-faut-proteger-durgence/

Ailleurs dans le monde, 3 autres groupes d’espèces d’abeilles du genre Apis existent ainsi que leurs innombrables sous-espèces. Il s’agit d’Apis dorsata, « abeille géante » d’Asie et d’Australie ; Apis florea, « abeille naine » d’Asie ; et Apis cerana, « abeille asiatique ». Toutes ces abeilles fabriquent le miel.

Qu’en est-il donc de ces trois groupes d’espèces et à quoi ressemblent-elles ?

Apis dorsata est répartie dans le sous-continent indien, du Pakistan au Sri Lanka et de la Chine à l’Australie. C’est une abeille géante et défensive qui bâtit un seul grand rayon d’une largeur de 1,80m, suspendu aux plus hautes branches des arbres émergeant de la canopée, les arbres à miel. Ces abeilles sont capables de migrer de façon saisonnière sur de longues distances, puis de revenir au site initial. Elles produisent du miel et les chasseurs de miel des villages locaux le récoltent au péril de leur vie. On dénombre quatre sous espèces qui ont évolué chacune en fonction des conditions locales.

Apis dorsata/Photos: BKsimonb & M.M. Karin

Apis florea est une espèce de petite taille, trois fois plus petite qu’Apis mellifera, elle est répartie de la mer d’Arabie en passant par l’Inde et l’Indonésie, elle vit jusqu’à 500 mètres d’altitude. Cette espèce n’est utilisée qu’exceptionnellement pour l’apiculture. Elle construit un rayon unique et elle a la particularité de danser sur la partie supérieure horizontale du rayon. Car oui, toutes les abeilles dansent ! Il s’agit d’un langage découvert dans les années 40 par l’autrichien Karl von Frisch. La danse en rond est exécutée par les butineuses qui ont trouvé une source de nourriture et transmettent aux ouvrières le type de plante découverte. La danse frétillante ou danse en huit renseigne sur la distance, la direction et la qualité des ressources disponibles.

Apis florea/Photo: Gidip

Les espèces d’abeilles de taille moyenne sont représentées par Apis cerana, l’espèce élevée par notre apiculteur Népalais. Ces abeilles construisent leur nid dans des cavités sur plusieurs rayons. L’Inde est le berceau d’Apis cerana répartie entre le japon et l’Afghanistan. Des études ont montré que cette espèce est l’hôte naturel de l’acarien parasite Varroa destructor. Fait très intéressant, elle a adapté son comportement et vit en équilibre avec le parasite alors que l’abeille occidentale Apis mellifera est très sensible à ce ravageur qui décime ses colonies.

Apis cerana / Photo: natureloveyou

A noter aussi que la sous espèce japonaise Apis cerania japonica, a la particularité de se défendre contre les attaques du frelon asiatique (Vespa velutina) et du frelon géant (Vespa mandarinia). Les abeilles forment une boule compacte autour de l’indésirable, puis font vibrer les muscles de leurs ailes. La chaleur produite tue le frelon, sa température létale étant légèrement inférieure à celle de l’abeille. Cette méthode de défense est appelée défense par hyperthermie.


Ces exemples montrent la capacité des espèces sauvages non domestiquées, et donc sans intervention humaine, à s’adapter et à lutter seules contre les prédateurs ou les maladies. Les traitements chimiques ne faisant qu’affaiblir le patrimoine génétique naturel de défense du genre Apis et par la même occasion rendre le parasite plus résistant aux traitements antibiotiques.

Apis cerana japonica/Photo: Takahashi
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